Edouard Le Pelletier
Responsable TPM
La sécurité énergétique, nécessité ou fantasme ? | 15 Janvier 2023 | EDITO
L’arrivée de la guerre en Ukraine a entraîné un bouleversement de l’ordre international dont nous n’avons pas fini de mesurer les conséquences. La crise énergétique nous pousse à revoir nos habitudes et à accélérer notre sortie de la dépendance aux énergies carbonées. Quant à la crise climatique, elle n’est plus une fiction d’experts, mais une réalité tangible et dévastatrice que chacun a pu appréhender à travers les épisodes d’inondation, canicule, sècheresse, incendies, qui se sont succédé l’an dernier et continuent de sévir en ce début d’année.
Sécurité, dépendance, vulnérabilité, sobriété énergétique… Quelle réalité recouvrent réellement ces mots particulièrement en vogue depuis le début du conflit en Ukraine ?
La sécurité énergétique consiste à assurer un approvisionnement constant en énergie à un coût abordable et stable. Les membres de l’Union européenne s’étant donné pour mission de respecter les obligations en matière de protection de l’environnement et de lutte contre le changement climatique, ils ont opté pour une stratégie énergétique commune qui vise à diversifier les sources d’énergie, à améliorer l’efficacité énergétique et à promouvoir les énergies renouvelables. Concrètement, cela passe par la mise en place de politiques de coopération avec les pays tiers, l’investissement dans les infrastructures de transport et de stockage de l’énergie, l’harmonisation des réglementations nationales en matière d’énergie… Cependant, l’opposition de ces mêmes Etats membres à toute ingérence de l’UE dans leurs relations extérieures constitue une pierre d’achoppement.
Cela étant dit, l’une des principales préoccupations de l’Union européenne reste sa forte dépendance à l’égard des importations d’énergie, en particulier du gaz naturel et du pétrole issus de Russie et du Moyen-Orient. Cette dépendance représente une vulnérabilité en matière de sécurité énergétique, car elle peut être affectée par toutes sortes de perturbations dans les pays fournisseurs ou de crises géopolitiques. Le conflit en Ukraine en est un parfait exemple, suscitant de nombreuses et lourdes inquiétudes. Ces dernières ont conduit l’UE à rechercher des alternatives, telles que l’exploitation de gisements de gaz de schiste, et à renforcer ses relations avec d’autres fournisseurs tels que les États-Unis et le Canada. Pour autant, ces solutions restent controversées, notamment quant aux impacts potentiels du gaz de schiste sur l’environnement ou la santé humaine.
Les décisions prises par la France sont également sujettes à débat. En effet, d’un côté le Parlement français a adopté, en septembre 2019, un projet de loi visant à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, dans lequel il est stipulé la volonté de réduire de 50 % la part du nucléaire dans la production d’électricité. D’un autre côté, de nombreux réacteurs nucléaires ont été récemment remis en service ; selon EDF, 41 des 56 réacteurs sont déjà fonctionnels et en marche, et ce chiffre devrait augmenter dans les prochains mois.
Pour autant, la France marque sa volonté de devenir une économie à faible émissions de carbone en adoptant des objectifs ambitieux en matière de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre. Pour atteindre ces objectifs, la France compte sur plusieurs leviers tels que le développement de technologies propres (énergie hydraulique, solaire, éolienne) ou encore la mise en place de dispositifs incitatifs visant à encourager les entreprises et particuliers à adopter des comportements plus respectueux de l’environnement (aide à l’achat de véhicules électriques…)
En résumé, l’énergie étant essentielle à la vie quotidienne et à l’économie, la sécurité énergétique est un enjeu majeur de notre temps. Et, bien que les pays de l’Union européenne s’activent à relever les défis qui y ont trait, plusieurs controverses apparaissent face aux réponses mises en œuvre (impact du gaz de schiste sur la santé, coût, dépendance…) Reste alors en suspens cette principale question : comment l’UE, dont la France, peut-elle diversifier ses sources d’énergie tout en garantissant une sécurité énergétique à un coût abordable pour les consommateurs ?